Institutions fortes, dispositions faibles ? : De la durabilité de l’ascétisme chez les ex-sportif·ves de haut niveau

En s’intéressant à l’ascèse parmi les ex-sportif·ves au travers de leurs habitudes corporelles (e.g. alimentation, santé), cet article vise à éclairer les processus sociaux favorisant ou défavorisant la durabilité d’une disposition acquise dans un contexte révolu. À l’appui d’une enquête par questionnaire (n = 1342) et entretiens (n = 65) auprès d’ex-sportif·ves de haut niveau résidant en Suisse, nous montrons que les individus les plus ascètes sont ceux qui ont évolué au sein des institutions sportives dont l’emprise était la plus faible. Cette apparente contradiction trouve sa résolution dans l’articulation des socialisations familiale et sportive, le poids de la première étant plus déterminant que celui de la seconde pour la formation de dispositions durables.

By examining the practice of asceticism amongst former athletes through their bodily regimens (e.g. diet, health), this article aims to shed light on the social processes that either foster or hinder the persistence of habits acquired in past contexts. Based on both a survey (n = 1342) and interviews (n = 65) with former elite athletes living in Switzerland, we show that the most ascetic individuals are those who developed within sporting institutions where their personal agency was weakest. This apparent contradiction is resolved by the link between family and sport socialization, the former being more decisive than the latter in shaping of enduring dispositions.